L’incarnation
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Chers frères et sœurs,

Pour garder une certaine logique dans cette série, je propose aujourd’hui d’aborder un nouveau mystère essentiel de la foi chrétienne. Avec celui de la Trinité (les fois précédentes) et celui de la Rédemption (à venir), le mystère de l’Incarnation distingue la parole chrétienne de tout autre discours sur Dieu.

Ces trois mystères sont centraux et si on ne les tient pas, la foi chrétienne s’évanouit.

Parmi les sujets que vous m’avez confiés, l’un d’eux était exprimé ainsi : « Jésus est un maitre philosophique, pas un Dieu. D’ailleurs, on est tous fils de Dieu. Lui-même est juste arrivé à une meilleure connaissance de Dieu. » Alors, cet homme, Jésus de Nazareth, le fils de Marie, est-il Dieu ?

C’est bien là la foi que nous proclamons dans le Credo : « Il est Dieu, né de Dieu, lumière, née de la lumière, vrai Dieu, né du vrai Dieu. » ; la foi qui nous fait dire aussi : « Sainte Marie, mère de Dieu. » Dans ce raccourci si osé, nous confessons que celui qui est né de Marie est Dieu.

Bien sûr, un autre travers serait de nier que Jésus est véritablement homme. Cette erreur est apparue dans les premiers siècles. Il n’est donc pas inutile de rappeler que nous croyons bien que Marie partage la nature humaine avec chacun de nous, ainsi que celui qu’elle a enfanté : Jésus.

Ce point était essentiel pour les Pères de l’Eglise : si Jésus n’était pas un homme, ce qu’il a accompli n’aurait pas de valeur salvifique pour les hommes. Nous voyons le lien avec le prochain sujet, celui de la Rédemption, mais nous n’allons pas nous y attarder cette fois-ci. Comprenons simplement que si Jésus n’avait pas agi en tant qu’homme, il n’aurait pas vraiment été « avec nous » et son sacrifice n’aurait pas été un acte humain dont la valeur aurait pu être mise au crédit de l’humanité entière. Il n’aurait été qu’un ovni extraterrestre dans notre histoire, il n’aurait fait que semblant de venir nous sauver.

Si nous acceptons donc que Jésus est bien un homme, qu’il est né, qu’il a grandi « en sagesse, en taille et en grâce, devant Dieu et devant les hommes » (Lc 2, 52), qu’il a mangé et bu, connu la fatigue et la souffrance, qu’il « a été crucifié, est mort et a été enseveli », la question est de savoir si cet homme est Dieu ou pas.

 La perspective est vertigineuse et paraît être sortie d’un cerveau malade mais c’est justement là que Dieu se révèle à nous. C’est ainsi que nous avons pu connaître son mystère trinitaire.

Le Verbe qui « était au commencement auprès de Dieu » (Jn 1, 2) et qui « était Dieu » (v. 1), ce Verbe qui est le Fils, la deuxième personne de la Trinité, « s’est fait chair, il a habité parmi nous » (v. 14).

Dieu est plus grand que ce que nous pouvions imaginer par nous-mêmes. Le Père est si grand dans le mystère de son amour qu’étant tout, il se donne tout entier à son Fils. Le Fils est si grand dans le mystère de son amour que n’étant rien par lui-même, il dépend tout entier de l’amour et du don de son Père. Vu ainsi, ce Fils ressemble bigrement aux hommes et à leur condition de créature. Ou plus exactement, ce sont les hommes qui pourraient ressembler bigrement à ce Fils s’ils acceptaient simplement de se laisser aimer et combler par le Père.

Dans cette lumière, il n’y a plus rien de scandaleux pour l’intelligence, ni pour la piété – bien au contraire – de croire que ce Fils, vrai Dieu, a pu se faire vrai homme et bien plus homme que nous d’ailleurs.

Le mystère de l’Incarnation que nous fêtons à l’Annonciation d’abord et dans le temps de Noël ensuite nous oblige à revoir nos idées sur Dieu. Le Fils n’est pas Dieu parce qu’il est immortel ou tout-puissant. Il est Dieu parce qu’il est dans la relation de communion parfaite avec le Père, qu’il reçoit tout de lui et que, comme lui, il n’est qu’Amour.

Qu’est-ce qui empêcherait la nature humaine, telle que Dieu l’a voulue, d’être dans cette relation de communion parfaite avec le Père et de tout recevoir de lui jusqu’à devenir saint comme lui seul est Saint ? A ce point, sans doute, pouvons-nous comprendre quel homme est Jésus. Vrai Dieu, le Fils, il est devenu pour nous « le dernier Adam – le Christ – l’être spirituel qui donne la vie » (1Co 15, 45), le parfait Adam, « semblable aux hommes en toute chose à l’exception du péché » (préface des dimanches VII), l’unique Sauveur de tous.

En lui, nous avons reçu toutes les « bénédictions de l’Esprit » (Ep 1, 3) que j’appelle encore sur vous.

Questions pour la réflexion commune

Pour moi, le Seigneur Jésus Christ est-il aussi véritablement homme que je le suis ?
Quelle importance cela a-t-il pour moi ?

Sans être le Père, Jésus de Nazareth est-il aussi véritablement Dieu que le Père ?
Quelle importance cela a-t-il pour moi ?

Pouvons-nous dire que Dieu a accepté de mourir pour nous ?

Comment est-ce que j’ai envie de réagir à la phrase indiquée dans l’enseignement : « Jésus est un maitre philosophique, pas un Dieu. D’ailleurs, on est tous fils de Dieu. Lui-même est juste arrivé à une meilleure connaissance de Dieu. » ?