Chers frères et sœurs,
Voici quelques semaines que je vous parle de cette dimension essentielle de notre vie humaine et chrétienne : les relations interpersonnelles. Dans l’ensemble et particulièrement la semaine dernière, j’ai surtout parlé de l’amour et c’est bien normal car c’est la valeur essentielle qui doit ressaisir toute notre vie, chacune de nos actions et spécialement tout ce qui concerne les liens avec les autres personnes. Aujourd’hui, je ne veux finalement pas vous parler d’autre chose. Parlons donc encore de l’amour mais vérifions qu’il s’agit d’un véritable amour, que nous vivons dans la vérité de l’amour.
Plusieurs fois, dans l’Ecriture, on trouve l’association de ces deux termes : amour et vérité.
Pour la fête de Trinité, nous avons entendu Dieu proclamer lui-même son nom et dire qu’il est « plein d’amour et de vérité » (Ex 34, 6).
Cela me fait penser à ce que dit la théologie sur la simplicité de Dieu. Qu’est-ce que cela signifie ? Cela signifie que si nous parlons de Dieu à partir de multiples attributs – la justice, la bonté, la puissance… – en réalité, chacun de ces attributs est dans sa valeur absolue, dans une dimension infinie, si bien que Dieu est la justice, la bonté, la puissance. Tous les attributs de Dieu sont identiques à son essence et sont donc identiques entre eux. En Dieu, la justice, la bonté, la puissance et tous ses autres attributs se rejoignent et sont identiques.
Comme il est dit dans le psaume 84 : « Amour et vérité se rencontrent, justice et paix s’embrassent » (v. 11). Pour nous qui sommes en chemin vers Dieu et vers cette unification complète de notre être, nous pourrions prendre comme devise un autre verset : « J’ai devant les yeux ton amour, je marche selon ta vérité » (Ps 25, 3).
Il nous faut en effet rechercher à tenir ensemble toutes les vertus et nous pouvons comprendre que c’est une exigence de l’amour comme de la vérité.
Dans les cultures ou dans les personnalités, on peut donner plus d’importance à telle ou telle valeur. Pour simplifier et rester sur notre thème, il me semble que la société moderne valorise davantage l’amour, malheureusement sans l’unir à la recherche de la vérité alors que d’autres époques ont fait le contraire. Vous l’avez compris, ce n’est pas meilleur d’un côté ou de l’autre. Si l’on valorise l’amour sans l’unir à la vérité, on n’a finalement ni l’un, ni l’autre car l’amour dont on parle n’est pas le véritable amour. Et si l’on valorise la vérité sans l’unir à l’amour, la vérité qu’on croit tenir est fausse. La vérité sans l’amour tue. L’amour sans la vérité ne construit rien et peut même détruire.
Ainsi, dans chacune de nos relations, nous devons non seulement mettre toute la tendresse de l’amour mais en plus – et pour l’amour lui-même – nous devons mettre aussi toute l’exigence de la vérité. Mais prenons maintenant le temps de donner quelques exemples.
Dans l’Ecriture, il est question de la correction fraternelle (cf. Mt 18, 15-17).
Jésus lui-même détaille un processus qui allie à la fois la recherche de la vérité et de l’amour. Il n’interdit pas de faire des reproches à un frère qui a commis des péchés contre soi. Il demande même d’en avoir le courage. Mais cela ne dispense pas des formes et de toute la délicatesse pour aider au maximum ce frère à prendre conscience de sa faute et de savoir qu’il peut s’en repentir. Il saura qu’il pourra trouver de l’aide dans la communauté chrétienne parce qu’il aura expérimenté son amour alors même qu’elle l’appelle à vivre une conversion.
Par manque d’amour, il est plus facile de se taire, comme à d’autres tempéraments de dire brutalement les choses comme pour se débarrasser ou se donner bonne conscience. Le titre d’un livre (que je n’ai pas lu) pourra évoquer à chacun des situations bien précises : « Cessez d’être gentil, soyez vrai ! ». Evidemment, il ne s’agit pas d’encourager la méchanceté mais nous savons bien qu’une certaine gentillesse est faible et ne sait pas lutter contre le mal. Prenons garde à la fausseté, à la faiblesse et à la lâcheté.
N’oublions pas de bien nous former sur les questions morales car on fait aujourd’hui beaucoup de mal avec des bons sentiments et si certains croient ainsi attraper un peu de bonheur en faisant taire leur conscience ou en évitant de la former, c’est au détriment de toute la société et surtout des pauvres et des petits. Pour terminer, je demande à Dieu « que [son] amour et [sa] vérité sans cesse [vous] gardent » (Ps 39, 12) et qu’il vous bénisse.
Questions pour la réflexion commune
- Puis-je imaginer ou me rappeler une situation où quelqu’un (moi, peut-être) a dit ou pensé servir l’amour en oubliant complètement la vérité, la justice, les devoirs envers les autres ?
- Puis-je imaginer ou me rappeler une situation où quelqu’un (moi, peut-être) a dit ou pensé servir la vérité en oubliant complètement l’amour de Dieu, du prochain ou de lui-même ?
- Pourquoi est-ce que la vérité de l’amour peut faire mal ? Comment est-ce que la vérité de l’amour fait du bien ?