La Confession (1) – Le Péché
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Chers membres des cellules,

Maintenant que le carême est commencé et avant le parcours de préparation à l’effusion de l’Esprit Saint que nous vivrons au temps pascal, pour répondre à la demande de certains, je vous propose une série de six enseignements sur le sacrement de pénitence et de réconciliation, autrement dit sur la confession. Et pour commencer, le premier des six chapitres sera sur le péché.

J’ose commencer directement par ce sujet parce que je suppose que vous savez ou bien que vous pourrez vous redire entre vous que ce « mystère d’iniquité » (2Th 2, 7) est comme pris en sandwich entre le mystère de la création bonne qui le précède et le mystère de la rédemption qui « l’engloutit dans la victoire » (1Co 15, 54).

Quand on n’a pas assez conscience de l’amour de Dieu et de sa puissance, on ne veut généralement pas entendre parler du péché et on n’ose pas le regarder en face, comme la Bible ose le faire. Sous la garde et la conduite de la Parole de Dieu, ne craignons pas d’avancer.

 L’Ecriture en effet ne nous berce pas d’illusion sur notre nature pécheresse, depuis la chute au jardin d’Eden, et sur notre besoin de salut. Souvenons-nous que notre nature reste fondamentalement bonne. La preuve en est qu’elle aspire toujours à la justice et à l’amour. Mais corrompue ou affaiblie, elle n’est plus tout à fait capable de les discerner, ni de les atteindre. Après cette révélation reçue de Dieu, « si nous disons que nous sommes sans péché, nous faisons de lui un menteur, et sa parole n’est pas en nous. » (1Jn 1, 10)

Si l’on regarde non la Bible mais le monde et son histoire, si l’on regarde l’actualité ou bien tout ce qui a pu arriver dans notre vie, nous sommes bien contraints de reconnaître la présence du mal.

Il est cependant souvent plus difficile de reconnaître notre complicité avec cette avalanche de boue qui ne cesse de tomber sur l’humanité. Jésus l’évoque avec la paille et la poutre. Pourtant, c’est bien à partir du même déséquilibre intérieur que les hommes commettent des actes mauvais et en contradiction avec le projet même de Dieu.

La solidarité humaine à ce sujet est entière et il est essentiel que chacun d’entre nous arrive à le reconnaître pour soi, sans quoi le salut lui passera dessus comme de l’eau sur les ailes d’un canard.

Pour avancer, je veux maintenant vous dire ou vous rappeler que le verbe “pécher” en hébreu signifie d’abord “rater la cible”. Il est utile de s’en souvenir plutôt que d’imaginer Dieu en gendarme planqué derrière un buisson qui guetterait une infraction de notre part.

L’homme a reçu une cible merveilleuse à atteindre dès sa création à l’image et pour la ressemblance de Dieu qui est amour. Le péché est comme une flèche qui manque la cible. Il faut dire que la chute originelle nous a troublé la vue et que la cible est devenue floue pour nous.

Il nous est arrivé d’appeler bien ce qui est mal et nous avons parfois longtemps refusé de regarder le bien que nous avions à faire pour continuer à avancer tranquillement dans une logique égoïste ou menée par la peur. Mais depuis l’Incarnation, notre cible devenue visible à nos yeux et c’est la sainte humanité de Jésus.

« Voici l’homme » (Jn 19, 5) dit Pilate désignant Jésus. Celui-ci n’a jamais fait que le bien et son cœur, toujours reconnaissant envers son Père, n’a cessé de battre par amour pour toute l’humanité qui allait pourtant le crucifier.

Si nous croyons que Jésus est la cible que l’homme doit atteindre, nous comprendrons très vite que nous en sommes incapables par nous-mêmes et que, bien loin d’être les justes que nous pensons parfois être, nous sommes véritablement et viscéralement pécheurs.

 La capacité à reconnaître nos manques d’amour est à la mesure de notre désir de ressembler à Jésus. Qui n’a pas véritablement soif de la sainteté, se reconnaîtra difficilement pécheur. Qui accueillera au contraire sa vocation, n’attendra pas d’avoir commis un crime pour confesser sa faute et se tourner vers son Sauveur. L’assurance de la miséricorde divine nous permet de reconnaître combien nos fautes offensent l’amour de Dieu et nous coupent de lui. L’amour de Dieu et l’horreur du péché vont ensemble.

Redisant déjà que « là où le péché s’est multiplié, la grâce a surabondé » (Rm 5, 20), je vous bénis.