Evangelii nuntiandi – 9
209 - Cellules paroissiales d’évangélisation - Viroflay - Juin 2012
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Paul VI fait remarquer qu’on ne peut pas évangéliser en étant insensible aux injustices, aux situations d’oppression, de pauvreté et de violence.

31. Nous avons tenu à le signaler nous-même en rappelant qu’il est impossible d’accepter « que l’œuvre d’évangélisation puisse ou doive négliger les questions extrêmement graves, tellement agitées aujourd’hui, concernant la justice, la libération, le développement et la paix dans le monde. Si cela arrivait, ce serait ignorer la doctrine de l’Évangile sur l’amour envers le prochain qui souffre ou est dans le besoin ».

Mais, en même temps, il met en garde ceux qui réduisent la mission de l’Église à une certaine libération sociale, de telle sorte qu’ils n’évangélisent plus.

32. Il ne faut pas nous cacher, en effet, que beaucoup de chrétiens généreux, sensibles aux questions dramatiques que recouvre le problème de la libération, en voulant engager l’Église dans l’effort de libération, ont fréquemment la tentation de réduire sa mission aux dimensions d’un projet simplement temporel … oubliant toute préoccupation spirituelle et religieuse, de réduire son activité à des initiatives d’ordre politique ou social. Mais s’il en était ainsi, l’Église perdrait sa signification foncière.

33. La libération que l’évangélisation annonce et s’efforce de mettre en œuvre … ne peut pas se cantonner dans la seule dimension économique, politique, sociale ou culturelle, mais elle doit viser l’homme tout entier, dans toutes ses dimensions, jusque et y compris dans son ouverture vers l’absolu, même l’Absolu de Dieu.

Autrement dit : une libération sociale ou un progrès économique aboutissant au matérialisme (sans autre perspective que le profit, les loisirs ou la consommation) et détournant l’homme de sa vocation spirituelle ne peuvent pas être considérés par l’Église comme une libération véritable. L’oppression et le sous-développement sont des maux. La liberté sociale et le progrès économique sont des biens… mais ils peuvent, dans un certain contexte, faire obstacle à l’ouverture vers l’absolu. Dans ce cas, il deviennent des facteurs d’aliénation et non de libération de “l’homme tout entier”.

34. C’est pourquoi l’Église — sans accepter de circonscrire sa mission au seul domaine du religieux, en se désintéressant des problèmes temporels de l’homme — réaffirme la primauté de sa vocation spirituelle, elle refuse de remplacer l’annonce du Règne par la proclamation des libérations humaines.

L’Église ne peut pas accepter d’être cantonnée au seul domaine religieux. Elle a un message et une mission dans le domaine social. Cependant l’évangélisation, c’est-à-dire l’annonce du salut en Jésus Christ, est sa priorité. Cet enseignement de Paul VI nous semble aller de soi… mais il n’allait pas de soi en 1975. C’est une époque où toute une partie des forces vives de l’Église avait renoncé à évangéliser. On peut supposer que c’est une des raisons du recul de l’Église en Occident.
Il semble que l’Église actuelle soit en train de surmonter cette crise.
Le message de cette lettre apostolique est particulièrement actuel, et il nous touche directement, nos cellules étant une réponse à ce message.
Ce message nous touche plus encore parce qu’il confirme notre projet : il signifie que plus nous serons fidèles à la règle de vie des cellules, mieux nous répondrons à ce que l’Église du Christ attend de ses fidèles.

35. L’Église rapproche mais n’identifie jamais libération humaine et salut en Jésus-Christ, car elle sait … qu’il ne suffit pas d’instaurer la libération, de créer le bien-être et le développement, pour que le Règne de Dieu arrive.
Bien plus, l’Église a la ferme conviction que toute libération temporelle, toute libération politique … porte en elle-même le germe de sa propre négation, tant que ses motifs profonds ne sont pas ceux de la justice dans la charité, tant que l’élan qui l’entraîne n’a pas de dimension vraiment spirituelle et que son but final n’est pas le salut et la béatitude en Dieu.

L’enseignement du Pape est que la violence révolutionnaire ne peut pas être un moyen légitime de libération. La doctrine sociale de l’Église a toujours soutenu que le progrès social ne pouvait résulter que de réformes et non de révolutions qui bouleversent la société, détruisent le tissu social et les libertés, et retardent généralement les vraies réformes.

37. L’Église ne peut pas accepter la violence … et la mort de qui que ce soit, comme chemin de libération, car elle sait que la violence appelle toujours la violence et engendre irrésistiblement de nouvelles formes d’oppression et d’esclavage souvent plus lourdes que celles dont elle prétendait libérer. Nous l’avons dit clairement au cours de notre voyage en Colombie : « Permettez enfin que nous vous exhortions à ne pas mettre votre confiance dans la violence et dans la révolution; c’est contraire à l’esprit chrétien, et cela peut aussi retarder, et non favoriser, l’élévation sociale à laquelle vous aspirez à bon droit ».

38. Ceci dit, nous nous réjouissons que l’Église prenne une conscience toujours plus vive de la façon propre, foncièrement évangélique, qu’elle a de collaborer à la libération des hommes. Elle fournit à ces chrétiens « libérateurs » une inspiration de foi, une motivation d’amour fraternel, et un enseignement social.

En tant que membres des cellules d’évangélisation, nous ne pouvons pas nous désintéresser de la doctrine sociale de l’Église, et en particulier de la défense de la liberté religieuse. Vous savez sans doute qu’au XXe siècle l’Église a connu plus de persécutions que dans tous les siècles précédents.

39. De cette juste libération liée à l’évangélisation, qui cherche précisément à réaliser des structures sauvegardant la liberté humaine, on ne peut séparer la nécessité d’assurer tous les droits fondamentaux de l’homme, parmi lesquels la liberté religieuse tient une place de première importance.
Nous avons récemment parlé de l’actualité de ce problème, en relevant « combien de chrétiens, aujourd’hui encore, sont étouffés par une oppression systématique parce qu’ils sont chrétiens et parce qu’ils sont catholiques ! Le drame de la fidélité au Christ et de la liberté religieuse continue, même s’il est camouflé derrière des déclarations catégoriques en faveur des droits de la personne humaine ».

Frères et sœurs que le Seigneur vous bénisse. Vous ne pouvez pas faire un plus grand cadeau à vos proches que leur donner l’Évangile.