Le commandement nouveau
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Chers frères et sœurs,

Il y a trois semaines, je terminais mon enseignement en vous parlant d’une manière trop rapide du commandement nouveau de l’amour. C’est sur cela que je reviens aujourd’hui et je commence par citer le Seigneur lui-même : « Je vous donne un commandement nouveau : c’est de vous aimer les uns les autres. Comme je vous ai aimés, vous aussi aimez-vous les uns les autres. » (Jn 13, 34)

Jésus qui a prêché pendant trois années ne s’était jamais exprimé ainsi. Il avait appelé à aimer les pauvres avec la parabole du pauvre Lazare. Il avait illustré ce que voulait dire aimer son prochain avec la parabole du bon samaritain. Il avait répondu à la question du premier commandement en reliant à la primauté de l’amour de Dieu l’exigence de l’amour du prochain. Il avait manifesté la radicalité de l’amour conjugal et de son lien indissoluble. Il avait parlé encore des devoirs de l’amour envers ses parents. Il avait exhorté à aimer même ses ennemis et ses persécuteurs. D’une manière générale, il avait enseigné la douceur, la patience et l’humilité, la générosité, l’esprit de service, la pureté et la miséricorde ; il avait banni l’hypocrisie, les jugements et la vengeance. A tout cela, on pourrait encore ajouter bien des choses par lesquelles Jésus avait complété ses paroles sur l’amour du prochain. Je pense par exemple à la place de la prière, à l’expérience de l’amour du Père, à la liberté par rapport à l’argent et aux soucis de la vie, au positionnement face à l’injustice, à la correction fraternelle, à la gravité du scandale et à tant d’autres aspects qui font aussi partie de l’enseignement de Jésus pour nous aider à accueillir et à vivre la justice qui surpasse celle des scribes et des pharisiens et qui nous permet d’entrer dans le royaume des Cieux. Chacun de ces aspects nous renvoie à un ou plusieurs passages des évangiles et nous appelle à une méditation personnelle, à un examen de conscience et à sa mise en pratique très concrète.

Tout cela est d’une richesse inépuisable mais voici que Jésus, à la veille de sa mort, conduit ses disciples et nous-mêmes à une profondeur insoupçonnée. En nous demandant de nous aimer les uns les autres « comme » il nous a aimés, il refait tout d’abord le lien entre sa personne et tout cet enseignement qui n’est pas chez lui un simple cours de morale aussi exaltante et exigeante soit-elle mais vraiment ce qu’il vit et qu’il est venu nous partager comme les secrets de son Cœur. Jésus n’est pas seulement quelqu’un qui parle bien – « Jamais un homme n’a parlé de la sorte ! » (Jn 7, 46) – et un docteur rempli de sagesse. Il est quelqu’un à imiter car il n’est pas comme ceux qui « disent et ne font pas. » (Mt 23, 3) Cela me fait penser à ce livre incontournable qu’est L’imitation de Jésus Christ.

Il faut cependant comprendre le mot « comme » avec encore plus de profondeur. Si Jésus en effet est plus qu’un professeur à écouter, il est aussi plus qu’un personnage du passé devenu un modèle à imiter. Nous le savons et nous l’annonçons : Jésus est ressuscité. Vivant, il offre plus que ses leçons et ses exemples : il offre son amitié et dans cette amitié fondée sur sa fidélité à laquelle répond notre foi, il nous donne l’Esprit Saint. Jésus nous dit encore : « Celui qui reçoit mes commandements et les garde, c’est celui-là qui m’aime ; et celui qui m’aime sera aimé de mon Père ; moi aussi, je l’aimerai, et je me manifesterai à lui. » (Jn 14, 21) Dans cette amitié, Jésus vit en nous et nous pouvons vivre en lui. Aimer « comme » Jésus, c’est aimer « par lui, avec lui et en lui » (doxologie finale des prières eucharistiques). Etre chrétien, c’est reconnaître et accueillir la vie divine qui nous est donnée dans le Christ, cette vie qui est celle de la sainte Trinité comme ce dimanche nous invite à la contempler et à l’adorer. En Jésus Christ, cet amour qui est la vie même de Dieu et qui est à l’origine de tout ce qui existe et surtout de nos existences humaines, cet amour qui est vécu dans une parfaite harmonie en Dieu devient chez nous l’amour douloureux mais surtout rédempteur, l’amour venu nous guérir de la blessure du péché et nous libérer de la domination du « prince de ce monde » (Jn 12, 31). Chaque jour, sur l’autel, nous est livré « le plus grand amour » qui consiste à « donner sa vie » (Jn 15, 13).

En recevant avec vous le commandement nouveau et la force de l’accomplir, je vous bénis.

Questions pour la réflexion commune

  • Comment est-ce que l’Evangile m’aide à aimer mieux et davantage ?
  • Qu’est-ce qui me touche particulièrement dans l’enseignement de Jésus et dans sa vie ?
  •  Quelles sont les paroles de lumière ou les épisodes qui me reviennent plus souvent ?
  • Qu’est-ce que le commandement nouveau de l’amour éclaire ce qui se vit à la messe ?