Les Béatitudes (8) – « Heureux les coeurs purs car ils verront Dieu »
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Chers membres des cellules,

 

Poursuivons notre approfondissement des Béatitudes. Cette fois, nous parlerons de la sixième d’entre elles : « Heureux les cœurs purs, car ils verront Dieu. »

Tout comme avec les « pauvres de cœur », il est évident qu’il ne faut pas entendre le mot cœur au sens biologique mais au sens du centre le plus profond de la personne, là où elle se détermine librement, faisant – ou pas – de ses choix des actes d’amour.

Comme dit l’Ecriture, « les hommes regardent l’apparence, mais le Seigneur regarde le cœur » (1S 16, 7) et c’est la Parole de Dieu qui « juge des intentions et des pensées du cœur » (He 4, 12). Pour la Bible, l’homme peut avoir un « cœur sans partage ».

 

David demande cette grâce pour son fils Salomon (1Ch 29, 19) et Ezékias plaide sa cause en disant dans sa prière que c’est ainsi qu’il a marché en présence du Seigneur (1R 20, 3 ou Is 38, 3). Au contraire, il arrive que Dieu se plaigne parce qu’Israël se tourne vers les faux dieux et qu’ainsi, « son cœur est partagé » (Os 10, 2). Ce qui est pur est sans mélange. Le cœur de l’homme n’a qu’un véritable trésor, Dieu, et il ne peut s’attacher à rien d’autre sans un grand dommage ou même un grand péril pour lui. C’est donc par amour pour nous que le Seigneur est « un Dieu jaloux » (Ex 20, 5) et qu’il ne supporte pas de rival dans notre cœur.

Jésus nous a averti : « là où est ton trésor, là aussi sera ton cœur » (Mt 6, 21). A chaque fois que nous nous attachons à des faux dieux, comme à l’Argent par exemple (v. 24), notre cœur se trouve divisé. Le drame de l’homme est que c’est sa situation native depuis le premier péché et que sans la grâce du Christ, nul ne pourrait retrouver la liberté et la joie d’un cœur pur, capable d’aimer Dieu plus que tout.

Revenons au récit de la chute, au troisième chapitre de la Genèse. Au commencement, le cœur de l’homme n’avait accueilli que la Parole de Dieu qui est aussi pour lui parole de vie mais depuis qu’il a consenti à la parole d’un autre, en l’occurrence le serpent, son cœur est partagé. Il est intéressant de constater que ce trouble de leur cœur a immédiatement changé le regard d’Adam et Eve.

Ils ne voient plus Dieu tel qu’il est puisqu’ils ont peur de lui (Gn 3, 10) et ils ne peuvent pas non plus voir et laisser voir leurs corps (v. 7) qui jusqu’à présent étaient nus. Sans le péché originel, notre regard sur le corps serait pur et nous ne verrions en lui que la trace de notre ressemblance divine. Souvenons-nous en effet que « Dieu créa l’homme à son image, à l’image de Dieu il le créa, il les créa homme et femme » (1, 27). La complémentarité de l’homme et de la femme n’a été voulue par Dieu qu’en vue de leur possible communion parfaite, merveilleuse icône de la communion trinitaire et donc du mystère même de Dieu. Au lieu de cela, profondément vicié, le regard de l’homme, livré à son déséquilibre intérieur, va jusqu’à se vautrer dans la pornographie et toutes sortes d’impuretés qui ne blessent pas seulement les personnes mais atteint même la beauté incomparable de Dieu.

 

En parlant ainsi du regard, je voudrais nous aider à comprendre que ce n’est pas un hasard s’il est dit que la récompense des cœurs purs est qu’ils pourront voir Dieu, en quoi consiste d’ailleurs la béatitude éternelle (lire aussi Ps 23 [24], 3-4). En effet, il ne s’agirait pas tellement d’une contrepartie de ce que nous aurions fait pour avoir un cœur qui aime Dieu sans partage. Ce serait plutôt une conséquence de ce cœur redevenu pur, par la grâce de Dieu, et qui rendra notre regard à nouveau capable de voir Dieu sans mourir. A ce sujet, rappelons-nous l’avertissement que le Seigneur fit à Moïse :

« Un être humain ne peut pas me voir et rester en vie » (Ex 33, 20). La raison en est bien simple : Dieu lui-même est pur ou, comme le dit la théologie thomiste, Dieu est simple. Un cœur impur ne saurait accueillir, en la voyant, cette simplicité de Dieu qui n’est qu’amour et la choisir pour lui. L’homme avec un tel cœur, en voyant l’Amour, se détournerait de lui et ce serait pour lui la damnation éternelle. Voilà pourquoi, avec le psalmiste, nous supplions sans cesse : « Créé en moi un cœur pur, ô mon Dieu, renouvelle et raffermis au fond de moi mon esprit » (Ps 50 [51], 12).

 

Pour que la grâce de Dieu poursuive en vous ce travail de purification de vos cœurs, je vous bénis.