“Il se fera enlever même ce qu’il a” (Mt 25,29)
Dominicales n° 632 - 13 novembre 2011 - 33e dimanche du temps ordinaire (Année A)
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“Il se fera enlever même ce qu’il a” (Mt 25,29)

Cette parabole est précédée, dans l’Évangile de saint Matthieu, de celle du serviteur fidèle à qui le maître avait confié tous ses biens : « Heureux ce serviteur que son maître en arrivant trouvera en train de faire son travail. En vérité, je vous le déclare,
il l’établira sur tous ses biens. » (Mt 24,46-47)
Dans ce récit il n’était pas question de dépôt à faire fructifier : Jésus mettait l’accent sur la qualité de l’attente… ne pas devenir comme le mauvais serviteur qui se dit : « Mon maître tarde », et qui se laisse surprendre.
Cette conception de la vie chrétienne comme une attente se retrouve dans la première lettre aux Thessaloniciens : « Vous savez très bien que le jour du Seigneur viendra comme un voleur dans la nuit. » (I Thess. 5,2)
« Vous savez très bien » dit saint Paul : le message est donc connu des chrétiens de Thessalonique, en l’an 50. Paul en avait déjà parlé ; ils l’avaient si bien compris que certains ne travaillaient plus : il attendaient la fin du monde d’un instant à l’autre.
Saint Paul devra leur écrire une seconde lettre pour revenir sur ce point. Il précise qu’il n’avait pas indiqué de date ; l’attente pourra durer un instant ou des millénaires, et, pour cette raison, il faut être constamment prêt… et être prêt, ce n’est pas
tout lâcher, c’est, au contraire, accomplir fidèlement notre tâche à tout instant, et de ce fait, avoir la conscience en paix et envisager sereinement le moment du face à face avec Dieu : « Vous, frères, vous n’êtes pas dans les ténèbres, ce jour ne vous
surprendra pas comme un voleur. » (I Thess. 5, 4)
Si nous avons un reste d’inquiétude, c’est peut-être que nos affaires ne sont pas en ordre, et c’est maintenant qu’il faut les mettre en ordre ; ce n’est pas demain qu’on se convertit.
La parabole des talents envisage également la fidélité et la rencontre de Dieu au terme de notre vie terrestre, mais elle porte moins sur la surprise que constituera le retour du Seigneur que sur l’aspect inévitable de notre rencontre avec Dieu ; et il est
vrai qu’il nous faudra rendre compte, un jour ou l’autre, de la gestion de notre vie.
Les personnages sont un propriétaire, qui représente Dieu, et trois dépositaires, qui représentent chacun d’entre nous.
Ils sont qualifiés de serviteurs : ce qui exprime bien le fait que, devant Dieu, nous ne sommes propriétaires ni de notre vie, ni de notre corps, ni de notre argent. Tout cela nous a été confié pour que nous portions du fruit.
Naturellement, il y a mille façons de porter du fruit : les dons de l’Esprit sont innombrables, et ils sont différents pour chaque personne.
Mais, dans tous les cas, on ne peut pas se contenter d’être un consommateur ; il est nécessaire de porter du fruit : ce n’est pas facultatif.
Un propriétaire c’est quelqu’un qui, en principe, n’a pas de comptes à rendre. Mais par rapport à Dieu, nous n’avons pas de droits : nous sommes comme des gérants qui devront rendre compte de tout.
Si le propriétaire d’un vignoble ou d’un verger le confie à un fermier, pour qu’il le cultive et récolte les fruits… et si le fermier ne fait rien, il est évident que le maître du domaine va lui retirer sa gestion.
C’est pourquoi, dans la parabole, celui qui n’avait rien fait de son talent se fait “enlever même ce qu’il a” : il se fait enlever ce qu’il avait en gestion.
Les talents que le Seigneur nous a confiés sont comme un vignoble, ou un verger, confié à un gérant : on a l’obligation de produire une récolte. Certains ont reçu la foi, dès leur enfance, et l’ont conservée, mais ils n’en ont rien fait : ils sont
inexcusables.
Si Dieu nous a confié un trésor, ce n’est pas pour l’enterrer : personne n’a le pouvoir d’en faire n’importe quoi… ni le pouvoir de ne rien en faire.
JCP