Depuis que les premiers pèlerins sont arrivés en Palestine (c’est à dire depuis l’empereur Constantin au 4ème siècle), les guides touristiques, pressés de questions, se sont demandé quelle pouvait être la “haute montagne” sur laquelle avait eu lieu la
Transfiguration.
Les montagnes de Galilée ne sont pas bien hautes… mais le Tabor donne une certaine impression de hauteur, et il fut adopté, peut-être avec raison.
Même s’ils connaissaient le lieu, les évangélistes préfèrent ne pas le préciser… et nous inviter à faire le rapprochement avec une autre montagne !
La Transfiguration de Jésus est ce qu’on appelle une “théophanie” : une manifestation divine. Or les deux principales théophanies de l’Ancien Testament ont eu lieu sur une montagne : le Sinaï (dont on ignore également l’emplacement exact).
C’est là que Yahvé avait parlé à Moïse et lui avait donné ses Commandements… et le seul personnage de l’Ancien Testament qui soit jamais retourné jusqu’à la “montagne de Dieu” est Elie : le prophète le plus prestigieux après Moïse… et, à lui aussi, Yahvé
s’était manifesté.
Or dans cette nouvelle théophanie, sur la montagne, Moïse et Elie sont aux côtés de Jésus transfiguré.
On sait que Saint Matthieu, qui adresse son Evangile à ses frères juifs, multiplie les allusions qui leur présentent Jésus comme un nouveau Moïse.
Moïse n’est pas seulement le plus grand prophète : celui qui a reçu la Loi de Dieu, il est aussi, sous l’autorité de Yahvé, le fondateur du Peuple de Dieu… il est son Guide charismatique… et celui qui l’a sorti de l’esclavage pour le conduire vers le salut !
Jésus est tout cela, bien mieux que Moïse, parce qu’il possède lui-même une autorité divine ! C’est ainsi qu’il fonde son Eglise (le Nouveau Peuple de Dieu)… elle est son “Corps” et il en est le Chef ou la Tête… et il est le Sauveur, unique et véritable, qui
apporte un salut éternel.
Jésus est également celui qui nous communique la parole de Dieu… et cet Evangile nous montre que, sur ce point également, il surpasse Moïse.
Dans les deux grandes théophanies de l’Ancien Testament, Dieu apparaît à Moïse et à Elie, et il leur parle.
Dans ce récit de la Transfiguration, Dieu n’apparaît pas à Jésus… c’est plutôt lui, le “Fils bien aimé”, qui apparaît dans sa gloire divine ! Et la voix de Dieu ne s’adresse pas non plus à Jésus, mais aux trois disciples : “Celui-ci est mon Fils bien aimé, en
qui j’ai mis tout mon amour, écoutez-le !” (Mt. 17,5)
Ici, Dieu ne dicte pas ses Commandements à Jésus, comme il l’avait fait avec Moïse… il dit simplement : “Ecoutez-le !”
Jésus est beaucoup plus qu’un “prophète” (un homme qui parle “à la place de Dieu”) lui-même est la “Parole”, comme le dira Saint Jean.
“Ecoutez-le !” C’est en réponse à cette demande du Père, unique dans le Nouveau Testament, que nous, qui sommes son Eglise, nous nous rassemblons chaque semaine pour entendre la Parole de son Fils.
Il est notre nourriture, par son Corps, mais aussi par sa Parole : “Car notre Sauveur le Christ Jésus s’est manifesté en détruisant la mort et en faisant resplendir la vie et l’immortalité par l’annonce de l’Evangile.” (2.Tim. 1,10)
JCP