“Celui-ci est le roi des Juifs.” (Lc 23,38) En mettant cette pancarte sur la croix d’un condamné à mort, les soldats ne pouvaient pas deviner que c’est en donnant sa vie sur la croix qu’il instaurait son règne… et que ce règne était le règne de Dieu.
Mais, dans l’hymne de la lettre aux Colossiens (1,13-20), qui est un chant liturgique de l’Église naissante, on voit que c’était la foi des premiers disciples. Ils savaient que ce crucifié avait le pouvoir “de tout réconcilier par lui et pour lui sur la terre
et dans les cieux, ayant établi la paix par le sang de sa croix.” (Col. 1,20)
Les premiers chrétiens reconnaissaient en lui le “Christ-roi” : “le Père nous a arrachés à l’empire du mal et nous a transférés dans le Royaume de son Fils bien-aimé, en qui nous avons le salut : la rémission des péchés.” (Col. 1,13-14) Ce que les Évangiles
appelaient le “Royaume de Dieu”, ils l’appellent ici : “le Royaume de son Fils”.
Ils voient en lui bien plus qu’un roi, mais une personne divine :
“Il est l’image du Dieu invisible, Premier-Né de toute créature, car c’est en lui qu’ont été créées toutes choses.” (Col. 1,15-16)
Ils savent que Jésus n’est pas une simple créature de Dieu : il est créateur, avec le Père, de tout ce qui existe.
Il existait avant la création du monde, et, à chaque instant, il fait exister cet univers : “Il est avant toute chose et tout subsiste en lui.” (Col. 1,17)
Saint Jean dit la même chose dans son Évangile : “Le Verbe (le Fils) était Dieu … tout a été fait par lui, et rien n’a été fait sans lui.” (Jn 1, 1-3) Tout ce qui existe, il le tient dans l’existence par amour.
Lui qui partageait éternellement la condition divine du Père, il a voulu entrer dans l’histoire des hommes :
“Et il est aussi la tête du Corps, c’est-à-dire l’Église.” (Col. 1,18)
L’Église est la communauté de ceux qui sont en communion avec le Christ. Il s’est fait proche au point d’être un seul corps avec nous.
Dans cette Église il est la tête : lui qui est le principe de la création, il est aussi le principe de notre salut et de la création nouvelle à son image : “Il est le Principe, le Premier-né d’entre les morts.” (Col. 1,18)
Il est le premier ressuscité : celui qui ouvre le chemin de notre résurrection, qui sera l’accomplissement de notre condition de fils de Dieu.
“Car il a plu à (Dieu) de faire habiter en lui toute la Plénitude.”(1,19)
Cette Plénitude reçue du Père, c’est l’Église qui “habite en lui.”
La lettre aux Éphésiens dit aussi que Dieu “l’a donné, au sommet de tout, comme Tête à l’Église qui est son corps : la Plénitude de celui qui remplit tout en tous.” (Éph. 1,22-23)
On peut comprendre que Jésus sans l’Église, cela ne serait pas la plénitude du Christ… non pas en ce sens qu’il aurait besoin de l’Église : c’est lui qui le principe de tout, de la création comme du salut… mais en ce sens que la raison de son incarnation est
de nous prendre avec lui dans la vie divine. Il s’est fait homme pour être un seul corps avec nous : pour que son Église partage la plénitude de sa filiation divine.
“Et de tout réconcilier par lui et pour lui sur la terre et dans les cieux, ayant établi la paix par le sang de sa croix.” (Col. 1,20)
C’est pourquoi, sur la croix, Jésus peut dire à celui qui est crucifié avec lui : “En vérité je te le déclare, aujourd’hui, tu seras avec moi dans le Paradis.” (Lc 23,43) Tu seras dans le Royaume définitif et éternel dont les portes se sont ouvertes par la
croix.
JCP
“Le Père nous a transférés dans le Royaume de son Fils” (Col. 1,13)
Dominicales n° 594 - 21 novembre 2010 - Fête du Christ, Roi de l'univers (année C)
“Le Père nous a transférés dans le Royaume de son Fils” (Col. 1,13)