“Le Seigneur m’a consacré par l’onction” (Luc 4,18)
Dominicales n° 562 - 24 janvier 2010 - 3e du temps ordinaire (Année C)
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“Le Seigneur m’a consacré par l’onction” (Luc 4,18)

Ce qu’on peut traduire : “Le Seigneur a fait de moi le Messie”.
En Israël, le Roi (le Messie) n’était pas couronné ; il était consacré par une onction. Messie (ou Christ) veut dire : “consacré par l’onction”.
Mais Jésus n’a pas été un roi terrestre : il n’a pas été consacré par une onction d’huile… et il évite de dire qu’il est le Messie. Alors pourquoi dit-il ici : “le Seigneur m’a consacré par l’onction” ? Ce qui revient à dire : “Je suis le Messie.”
Cette parole est une citation. Jésus lit un passage du prophète Isaïe, qui disait : “L’Esprit du Seigneur est sur moi, parce que le Seigneur m’a consacré par l’onction.” (Is 61,1)
Dans ce texte, ce n’est pas un roi qui parle : c’est un prophète. L’onction qu’il a reçue n’est pas une onction d’huile qui aurait été versée par un homme : c’est Dieu lui-même qui a consacré Isaïe par l’onction. Cette onction n’est pas une onction royale, ce
n’est pas non plus un rite visible.
Isaïe n’a pas été consacré d’une manière humaine, mais par “l’Esprit du Seigneur”. L’onction qu’il a reçue ne fait pas de lui un roi, mais un prophète. Si Isaïe a été consacré par Dieu, ce n’est pas pour prendre le pouvoir : sa mission est d’un tout autre
ordre. Il dit : “Le Seigneur m’a envoyé porter la bonne nouvelle aux pauvres.” (Is 61,1)
Ayant lu ce texte d’Isaïe, Jésus ajoute : “Cette parole de l’Écriture, c’est aujourd’hui qu’elle s’accomplit.” (Luc 4,21) Il s’approprie cette parole d’Isaïe : il l’utilise pour nous faire comprendre la vraie nature de sa mission. De tous les textes de
l’Ancien Testament qui parlent d’une onction messianique, c’est le seul qu’il s’approprie de cette façon.
Jésus ne revendique pas une puissance royale ; s’il est venu, c’est pour apporter la Bonne Nouvelle aux pauvres : à ceux qui ont un cœur de pauvre.
Il n’est pas surprenant que la première des Béatitudes leur soit adressée :
“Bienheureux ceux qui ont un cœur de pauvre : le Règne de Dieu leur appartient.” (Mt 5,3)
Ils sont bienheureux parce qu’ils possèdent le Royaume véritable que Dieu vient donner aux pauvres : ce royaume qui est un don et qu’on ne peut accueillir que si on est capable de tendre la main.
Peut-on dire plus précisément qui sont les pauvres auxquels Jésus apporte la Bonne nouvelle ?
Ce n’est pas une tranche sociale dont les revenus seraient sous un certain seuil. Ils ne sont pas une certaine catégorie d’hommes qu’il aurait choisie… à l’exclusion d’une autre catégorie.
Il suffit de relire l’Évangile pour voir que Jésus n’exclut personne. Il n’avait aucun critère de recrutement : il ne faisait aucune sélection préalable !
Dans la parabole des invités au festin (Lc 14,15-24), le maître invite tout le monde : ses amis, et ensuite tous ceux qui veulent entrer. On dirait aujourd’hui qu’il invite vraiment n’importe qui… et c’est là notre chance ! Mais il y a ceux qui viennent en
courant… et ceux qui n’en ont rien à faire de l’invitation de Dieu.
Qui sont ces pauvres qui accueillent la Bonne Nouvelle ?
Il y a les grands pécheurs qui finissent par se convertir, et à qui Dieu pardonne tout. Mais il y a aussi tous ceux qui ont toujours bien fait leur tâche, sans prétention, estimant qu’ils n’ont fait que ce qu’ils devaient faire : eux qui ont été capables
d’aimer… de se faire serviteurs… et qui ont trouvé cela normal.
Au terme de leur vie, ils n’ont pas le sentiment d’avoir des droits devant Dieu : ils voient ce qui a été imparfait, et ils espèrent le pardon de Dieu. Ils ne le revendiquent pas… ils s’en remettent à la tendresse de Dieu.
JCP