Cette semaine, dans une émission sur Jésus, un des intervenants expliquait doctement qu’il ne fallait pas confondre le Jésus de l’église, dont on a fait un Dieu… avec le Jésus historique, qui est tout différent !
Ce qui prouve qu’on peut parler à la radio… et ne pas savoir lire les Evangiles ! En fait, le Jésus de l’Evangile ne cesse de faire allusion à sa nature divine, mais il le fait dans un langage qui est celui de l’Ancien Testament, et que nous ne comprenons pas
toujours.
Si on comprend ce langage, on s’aperçoit que la divinité du Christ apparaît dès les premières lignes de l’Evangile de Marc : “Commencement de la Bonne Nouvelle de Jésus Christ, Fils de Dieu. Selon qu’il est écrit dans le prophète Isaïe : Voici que j’envoie mon
messager devant toi pour préparer le chemin devant toi.” (Mc 1,1-2)
En fait, cette première partie de la citation n’est pas d’Isaïe, mais de Malachie. Dans cette prophétie, c’est Dieu qui parle : «Voici que j’envoie mon messager pour qu’il prépare le chemin devant moi.» (Mal 3,1)
Il y aura un messager qui préparera la venue de Dieu dans le monde… et les Juifs comprenaient que ce serait la fin du monde !
L’évangéliste nous laisse d’abord entendre que le messager est Jean Baptiste… qui a préparé la venue, non pas de Yahvé… mais de Jésus !
Mais ce qui est plus étonnant, c’est que l’Evangile cite le texte en le modifiant. Il ne fait pas dire à Dieu : Voici que j’envoie mon messager pour qu’il prépare le chemin devant moi»… mais : «devant toi» ! Et ce n’est pas une coquille… c’est un procédé
littéraire fréquent dans la Bible. Il consiste à prendre un ancien texte qui parlait de Yahvé… et à mettre Jésus à la place ! C’est une façon de nous dire que la venue et la manifestation dans le monde de Yahvé, annoncée par Malachie… a eu lieu ! En fait,
c’est l’histoire de Jésus de Nazareth… Dieu en personne… venu dans le monde.
Ce langage, qui nous surprend, n’est pas celui que l’église aura par la suite… c’est celui des tout premiers chrétiens, qui étaient des Juifs nourris de l’Ancien Testament ! Ce mode d’expression, purement sémitique, laisse entendre que Jésus est Dieu.
Ce n’est pas une invention tardive : c’est le langage des premiers jours de l’église ! Ce genre d’allusion à la divinité de Jésus est à chaque page de l’évangile, si on sait le lire !
D’ailleurs, on le voit dans la suite de la citation,.. qui est bien un texte d’Isaïe : “Voix de celui qui crie dans le désert : préparez le chemin du Seigneur (le chemin de Yahvé).” (Is. 40,3)
C’est une prophétie écrite pendant la déportation à Babylone. Isaïe annonce la fin de l’exil : Dieu va revenir à Jérusalem… il faut préparer son chemin (en se convertissant).
Dans le livre d’Isaïe, on ne sait pas très bien qui représentait cette voix mystérieuse… mais “le Seigneur”, c’était Yahvé !
L’Evangile de Marc suppose que la voix qui crie dans le désert est celle Jean Baptiste… et donc que le “Seigneur”… c’est Jésus !
Telle est la façon de parler des Rabbins de l’époque… et des évangélistes !
Il y a ainsi, des dizaines, ou plutôt des centaines, de passages du Nouveau Testament qui affirment, dans ce langage archaïque, la divinité de Jésus !
Si on comprend ce langage, on voit bien que le Jésus des évangiles n’est pas différent de celui de l’église, tel qu’on le retrouve dans le Credo.
On dit, dans le Credo de Nicée, que Jésus est “de même nature que le Père” : il est Dieu comme le Père… ce langage est celui des gréco-latins que nous sommes, mais la foi est bien la même. L’Eglise a changé de langage, mais elle est restée fidèle au message de
l’évangile.
JCP